Le chef de la direction de TotalEnergies est catégorique : les grandes entreprises pétrolières occidentales font déjà beaucoup en matière de climat. Patrick Pouyanné souhaiterait maintenant que la pression s’intensifie sur les entreprises nationales, notamment celles du Golfe. Pour lui, le président émirati controversé de la COP28 est l’individu le mieux placé pour exercer cette pression.Sultan al-Jaber s’efforce de faire avancer les discussions, il est conscient qu’il est très attendu sur ce sujet”, affirme le dirigeant du groupe français dans un entretien à l’AFP. Comme les autres grandes entreprises pétrolières privées mondiales (Shell, ExxonMobil, Chevron et BP), il reçoit sa part de critiques, voire de procès, pour ses investissements constants dans les hydrocarbures.D’après l’Agence internationale de l’énergie (AIE), en 2018, les grandes entreprises occidentales produisaient 15% du gaz et du pétrole mondiaux, tandis que les entreprises nationales, majoritairement ou entièrement détenues par des États (dans le Golfe, en Chine, en Iran…), dominaient le marché avec plus de 50% de la production, que ce soit sur leur territoire ou à l’international.Les Emirats arabes unis ont été vivement critiqués par des ONG et des élus européens et américains pour avoir choisi pour présider la COP celui qui est également le dirigeant du géant pétrolier national ADNOC. Celui-ci rétorque qu’il a créé en 2006 Masdar, une entreprise nationale émiratie spécialisée dans les énergies renouvelables, et qu’il a représenté son pays à 12 COP.
Sa double casquette : un atout ?
“Je sais qu’il y a du scepticisme à l’égard de Sultan al-Jaber… mais je pense qu’au contraire, nous devrions profiter de son double rôle”, continue M. Pouyanné dans sa première interview consacrée à la COP28. “Cette position met plus de pression sur les pays producteurs”, estime le PDG, qui le connaît depuis près de 20 ans.“Les Emirats arabes unis veulent que la COP à Dubaï soit perçue comme un succès”, ce qui crée “un enjeu de réputation”, déclare-t-il. “Cela place al-Jaber dans une position de porte-parole des engagements de l’industrie pétro-gazière”, selon M. Pouyanné, qui le considère comme “un industriel pragmatique”.M. al-Jaber plaide pour une accélération de la production des énergies renouvelables, mais, tout comme M. Pouyanné, il soutient que les combustibles fossiles restent essentiels. Il mise sur les technologies encore en développement de capture du carbone pour réduire les émissions de carbone responsables du réchauffement.Quels objectifs pour 2030 ?
À travers les propos de M. Pouyanné, on peut entrevoir ce que pourrait être un résultat de la COP28, en décembre à Dubaï : en l’absence d’un appel à la fin des énergies fossiles, M. al-Jaber pourrait vouloir multiplier les grands engagements privés de la part de secteurs économiques entiers, comme dans l’énergie, notamment sur le méthane, l’autre grand gaz à effet de serre après le CO2.“Chaque entreprise nationale devrait avoir au moins un objectif, et pas seulement les grandes majors”, insiste le Français.“Là où il peut nous apporter quelque chose de très fort, c’est de faire en sorte que toutes les entreprises nationales se retroussent les manches et s’engagent à l’horizon 2030 vers le zéro émission de méthane et la réduction de leurs émissions” opérationnelles (dites de catégories ou “scopes” 1 et 2), explique le dirigeant français.Plus de 80% de l’empreinte carbone d’une entreprise pétrolière provient de la combustion de ses produits par les clients (“scope 3”) ; cependant, ce sont principalement les entreprises occidentales qui se sont fixé des objectifs de réduction sur les trois “scopes”.“Pour lui, le problème ce n’est pas les combustibles fossiles, c’est de réduire les émissions des combustibles fossiles. Et en même temps, il dit qu’il faut accélérer la construction du nouveau système énergétique”, ajoute M. Pouyanné.“C’est une vision pragmatique qui correspond fortement à la vision des pays émergents (…) qui disent +on a besoin d’énergies fossiles+”, souligne-t-il. Et “la demande de pétrole continue d’augmenter dans le monde!”“On n’arrivera pas à lutter contre le changement climatique en interdisant les énergies fossiles. Le vrai sujet, (…) c’est de construire le nouveau système. Et ce n’est pas parce qu’on ferait baisser les combustibles fossiles plus rapidement que l’on accélérerait la construction du nouveau système”, juge-t-il.“Il faut inclure un maximum de pays producteurs. En tout cas, c’est la recommandation que je lui adresserais”, insiste M. Pouyanné.Quels pays? “Je ne veux pas pointer du doigt un pays en particulier mais on sait bien que ce sont les pays producteurs, notamment du Moyen-Orient”, indique-t-il, avant de prévenir : “C’est par la diplomatie que l’on y arrivera.”Source : Info Durable
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