Est-ce que le nom du Livret de développement durable et solidaire (LDDS) est trompeur ? C’est ce que les critiques du LDDS, avec Bruno Le Maire en premier lieu, soutiennent. Selon eux, l’impératif d’investissement dans ces domaines ne s’applique qu’à un faible pourcentage des 142,2 milliards d’euros de fonds disponibles.

La série de critiques

“Le livret de développement durable et solidaire (LDDS) n’est pas vraiment conforme à son nom”, a déclaré le ministre délégué à l’Industrie, Roland Lescure, le 4 juillet devant une assemblée de professionnels de la finance réunis lors du Paris Finance Forum. Il emboîtait ainsi le pas au ministre de l’Économie qui, lors de la présentation d’un rapport du groupe de réflexion The Shift Project le 15 décembre dernier, avait critiqué le LDDS, affirmant qu’il n’avait de “durable” et de “solidaire” que le nom. “De nombreux produits financiers sont présentés comme écologiques, mais ne le sont que très partiellement, voire pas du tout”, avait-il alors précisé. Avant eux, le réseau d’entreprises Impact France avait lancé l’une des premières attaques contre le LDDS en 2021, en appelant à ce que “100% des fonds du LDDS soient entièrement consacrés à la transition sociale et écologique”.

“Conformité à la norme”

Malgré ce que pourrait laisser croire une appellation différente, les règles d’utilisation des quelque 25 millions de Livrets de développement durable et solidaire sont les mêmes que celles du Livret A. 59,5% des sommes de ces deux livrets sont gérées par la Caisse des dépôts (CDC), et les 40,5% restants sont conservés dans les bilans des banques. La part gérée par la CDC finance “des programmes d’intérêt général favorisant l’économie responsable et la mutation énergétique et écologique”, selon l’institution dans son rapport 2022 du Fonds d’épargne, publié en juin. “Aujourd’hui, beaucoup de prêts accordés aux organismes de logement social concernent la rénovation thermique” des bâtiments, assure à l’AFP le président de la Commission de surveillance de la CDC, Alexandre Holroyd, combinant ainsi les deux aspects durable et social. Sur les 13,6 milliards d’euros de nouveaux prêts accordés l’année dernière, la moitié étaient classés dans la catégorie “transition écologique”, selon la CDC. L’autre partie des fonds est investie dans des actifs financiers “conformément aux normes de la finance verte”, souligne M. Holroyd.

10% ou plus de 100% ?

Sur les 40,5% conservés dans les bilans des banques, au moins quatre cinquièmes doivent être utilisés pour financer les PME, 10% pour financer la transition énergétique ou la réduction de “l’empreinte climatique” et 5% pour l’économie sociale et solidaire (ESS). Les 10% alloués à la transition énergétique peuvent sembler insignifiants. “On pourrait se demander s’il ne serait pas judicieux d’augmenter peut-être la part qui devrait être consacrée à la transition énergétique”, a suggéré mardi le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, lors de la présentation du rapport annuel sur l’épargne réglementée.Cependant, les banques vont bien au-delà de ce seuil de 10%, grâce aux prêts à taux zéro dits “écologiques” et au financement de nouveaux logements conformes aux dernières normes énergétiques. Si la part consacrée à la transition écologique monte “à 20% et 25%, où allez-vous prendre les pourcentages supplémentaires ? Sur les PME ?”, se demande auprès de l’AFP le président de FAIR, une association de promotion de l’ESS, Frédéric Tiberghien. “C’est politiquement difficile”, le gouvernement “l’a bien compris et a donc décidé de lancer un nouveau livret”, ajoute-t-il.

Un nouvel acteur

En effet, bien que Bercy travaille à des “améliorations” du LDDS, l’objectif est clairement de lancer un nouveau produit appelé “plan épargne avenir climat”, inclus dans le projet de loi sur l’industrie verte discuté depuis lundi à l’Assemblée nationale. Les détails de ce produit “entièrement et totalement vert” selon le ministre de l’Économie restent à définir, mais son modèle est basé sur le plan d’épargne retraite (PER), à ceci près qu’il est destiné aux mineurs. Contrairement au LDDS, l’épargne accumulée par les parents pour leurs enfants dans ces plans sera bloquée jusqu’à la majorité du titulaire, un mécanisme essentiel pour “financer des projets à plus long terme nécessaires à la transition écologique”, précise Bercy. Distribué par les acteurs traditionnels de l’assurance-vie (assureurs, banques…), son rendement dépendra de leurs stratégies d’investissement. Contrairement au LDDS, le capital ne sera pas garanti par l’État.Source : Info Durable